Quand le geste dansé guérit

Quand le geste dansé guérit

Chacun a pu constater, face à un thérapeute ou en tentant de se confier à un proche, les limites du langage pour exprimer un ressenti, une blessure ou un traumatisme. Le geste dansé, alors, s’avère d’une aide précieuse pour remplacer le langage parlé.

Un langage intuitif non verbal 

Le geste dansé offre tout d’abord à l’élève et au professeur un langage commun non verbal et non mentalisé. La mise en mots du monde, des expériences vécues et du ressenti est évidemment essentielle dans la mesure où elle permet de mieux cerner intellectuellement un vécu, de le contenir et de se l’approprier, plutôt que de le subir. Toutefois, il se trouve des situations au cours desquelles les mots ne sortent pas. Soit qu’ils sont trop douloureux à formuler, soit qu’on ne les connaît même pas, car l’intellect peine à conceptualiser efficacement le vécu ou à nommer précisément le ressenti. Le mouvement, ici, ira se substituer à la dénomination directe du vécu, avec deux vertus majeures : une expression simplifiée et imagée du vécu, et à l’aide d’images évocatrices. 

Danser la colère

J’ai pu par exemple observer, au cours de mes heures de pratique individuelle et en tant que professeur, la difficulté que peuvent rencontrer les femmes à exprimer leur colère. Dans la société patriarcale et misogyne à laquelle nous appartenons, la colère est une émotion masculine. Elle fait du bruit, elle prend de la place, elle amène parfois à une perte de contrôle. Ça ne correspond pas à l’archétype patriarcal de la femme – douceur, discrétion, sacrifice de soi pour l’autre et contrôle de ses émotions. 

Ainsi, et souvent bien malgré elles, les femmes s’interdisent inconsciemment toute manifestation de colère, et en viennent même à parfaitement inhiber cette émotion chez elles. Cela n’empêche évidemment pas la colère de grandir, de prendre de la place, de susciter de l’incompréhension ou de la culpabilité… Et d’exploser parfois de manière destructrice pour l’individu qui n’a pas su l’ex-primer, soit littéralement la sortir de lui ou elle.  

Comment alors aider ces femmes qui n’ont pas de vocabulaire, pas d’outils intellectuels pour conceptualiser et exprimer ce sentiment de colère ? Le mouvement dansé a tout son intérêt, car il donne une forme concrète à ce sentiment méconnu : visualisation de la couleur rouge, danse du du feu, utilisation d’énergies corporelles brutales et saccadées… On propose finalement la même qualité et authenticité d’expression, mais en contournant les barrières du mental et les limitations du vocabulaire. L’autre avantage du mouvement est bien évidemment sa portée universelle : le rouge, le feu et le saccadé évoquent intuitivement à beaucoup d’Européens de notre époque la thématique de la colère. La danse nous connecte à un langage universel

Le geste dansé comme vecteur de créativité et d’empouvoirement

Le mouvement dansé aide également à se connecter à son pouvoir d’imagination et à sa créativité. Ce sont des outils extrêmement puissants de réappropriation de son environnement et de son propre schéma narratif. En utilisant son imagination, en faisant appel à des images mentales et des manières de bouger qui datent parfois de l’enfance. On s’autorise à apporter quelque chose de soi à sa représentation du réel. Egalement, on invente des mouvements et des formes, on sort de sa zone de confort. On connaît d’ailleurs les vertus de la créativité dans toutes les branches de l’art-thérapie. En créant, en inventant, on prend la main sur son mode d’expression, on laisse sa trace dans le monde et on affirme son individualité.  

En danse-thérapie, on a par ailleurs l’immense chance de disposer de tout le vocabulaire de son corps, ce qui décuple encore les possibilités de création et d’expression. J’ai trouvé ainsi en la danse le plus bel outil de connexion à son intériorité, dans le sens où elle fait fi du langage verbal. Elle permet de contacter une facette de soi plus brute, plus sauvage, moins policée par les conventions et le convenable. 


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